A Winckel, près de la source de l'Ill, se trouve une chapelle appelée la chapelle Saint-Georges.

Ce lieu est paisible pendant la journée; mais le soir, à partir de onze heures, un combat terrible se renouvelle chaque nuit.

Un cobat de fantômes, une lutte d'ombres... écho d'un drame terrible datant de plusieurs siècles.

En 1308, l'Alsace appartenait au Saint-Empire romain germanique.

Albert Ier, duc D'autriche, était empereur d'Allemagne. Pour mieux affermir sa domination sur ses sujets, il choisissait ses lieutenants parmi les hommes les plus cruels et les plus féroces.

En conséquence, l'Empire était le théâtre de toutes sortes d'injustices, d'abus et de meurtres.

Les atrocités devinrent telles que des conjurés se liguèrent pour se débarrasser de l'empereur. Son propre neveu, Jean de Souabe, prit la tête du soulèvement. Albert Ier fut poignardé lors d'un séjour en Suisse.

Mais les conjurés ne purent prendre le pouvoir. La fille d'Albert Ier, Agnès de Hongrie, se vengea d'une manière terrible sur les meurtriers de son père. Elle fit notamment supplicier le seigneur Adolphe de Warth, qui mourut sur la roue après trois jours de tortures. Elle ne permit jamais à sa veuve, Adélaïde de Sargans, de donner une sépulture digne au corps de son mari.

Et c'est ici que la légende prend le relais de l'histoire...

Le soir, près de la source de l'Ill, apparaît le fantôme d'Adélaïde de Sargans. Elle transporte des blocs de pierre afin d'édifier une sépulture pour son époux.

Il lui faudrait réunir 300 pierres pour que le pauvre Adolphe de Warth trouve enfin le repos.

Mais Adélaïde n'arrive jamais à en réunir plus de cent...

Car chaque nuit surgit le fantôme de la cruelle Agnès de Hongrie

qui attaque Adélaïde de Sargans pour l'empêcher d'accomplir son ouvrage.

L'ombre d'Agnès se précipite sur celle d'Adélaïde, lui fait lâcher la pierre qu'elle transporte, pierre qui roule jusqu'au bas de la montagne...

- Pitié ! implore Adélaïde.

- Vengeance ! réplique Agnès.

Et ce combat d'ombres se poursuit pendant trois heures...

A la fin, les ombres regagnent la source de l'Ill.

Alors s'élève un douloureux gémissement, la plainte d'Adolphe de Wart, qui se désespère une fois de plus de ne pas recevoir la sépulture où il trouverait enfin le repos.

On raconte que des gens de Winckel, rentrant tard le soir à leur logis, assistèrent à ce terrible combat d'ombres, et ne purent jamais se remettre de leur frayeur.